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Pierre et le loup - Création - Succès
LES CIRCONSTANCES DE LA CREATION
C’est au printemps 1936 que Prokofiev, sollicité par Nathalie Satz, directrice du théâtre central pour jeune public, va se pencher sur le monde féerique de l’enfance. Celle-ci souhaitait que le compositeur écrive spécialement à l’intention des enfants un conte symphonique. En une semaine, le compositeur conçoit le scénario et la musique de Pierre et le loup. Ce conte symphonique s’articule autour de 3 mouvements :
- Variation des personnages autour du thème central de Pierre.
- Agitato, péripétie et drame.
- Victoire de Pierre, final triomphant.
LES RAISONS D’UN SUCCÈS MONDIAL
Dès sa création, le 2 mai 1936 dans la nouvelle salle du théâtre pour enfants, le succès est au rendez-vous. Ce sera bientôt le tour des Américains d’accueillir l’œuvre triomphalement avant qu’elle n’acquière une popularité mondiale.
« Pierre, le jeune héros du conte, auquel tous les enfants du monde peuvent s’identifier, se trouve en compagnie d’une petite ménagerie : il y a le chat naturellement, le canard, l’oiseau et le méchant loup. Tous les ingrédients sensibilisant l’âme enfantine sont présents : la forêt profonde, un brave grand-père et des chasseurs. Subtilement, Prokofiev utilise un récitant qui conte l’histoire et y ajoute un contexte pédagogique, créant ainsi un genre plein d’attraits et tout à fait inédit. »
Michel Dorigné, Serge Prokofiev, Paris, Fayard, 1994.
UNE FANTAISIE ZOOLOGIQUE A VERTU PEDAGOGIQUE
Le compositeur définit lui-même son plan : « chacun des personnages de ce conte est présenté par un instrument de l’orchestre : l’oiseau par la flûte, le canard par le hautbois, le chat par la clarinette staccato dans le registre grave, le grand-père par le basson, le loup par les trois cors, les fusils des chasseurs par les timbales et la grosse caisse, Pierre enfin par le quatuor à cordes. Avant l’exécution, il est préférable de présenter ces divers instruments aux enfants et de leur jouer les leitmotive. De cette façon ils apprendront sans effort à identifier les différents instruments de l’orchestre. »
POUR UNE AUTRE LECTURE DE L’ŒUVRE
Quelques fins esprits ont pu voir en Pierre et le loup une œuvre à clés. Elle contiendrait, en effet, des allusions politiques voilées. Ainsi, Pierre, serait-il le parfait héros soviétique, courageux, pragmatique et inventif. Le canard, avec son sympathique embonpoint et fuyant dès qu’il voit poindre le danger, représenterait le bourgeois. Quant aux chasseurs, qui font beaucoup de bruit pour rien, ils symboliseraient les hommes politiques…
« Dans cette interprétation, l’appareil est tourné en dérision, tandis que triomphe l’acte individuel de Pierre. Un acte gauchiste, en quelque sorte. »
Michel Dorigné